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Dépakine : l’action de groupe jugée recevable

La justice vient de reconnaître la faute de Sanofi dans la vigilance et l’information sur son antiépileptique à base de valproate de sodium (Dépakine, Dépakote, etc.), qui entraîne malformations et troubles envahissants du comportement chez les enfants exposés in utero. La décision ouvre la voie à la première action de groupe dans le domaine de la santé.

C’est une première : dans un jugement rendu le 5 janvier, le tribunal judiciaire de Paris a estimé recevable la demande d’action de groupe en santé publique formulée par l’Apesac, association des victimes du valproate de sodium (Dépakine, Dépakote, Micropakine, etc.). Ce médicament, prescrit depuis le milieu des années 60 dans l’épilepsie et les troubles bipolaires, est aussi, malgré son efficacité, hautement toxique pour l’enfant à naître quand la mère est sous traitement pendant sa grossesse. Des malformations graves sont courantes, de même que la survenue de troubles neurocomportementaux, comme l’autisme. Ces effets indésirables sont connus depuis le milieu des années 80, pourtant Sanofi, le fabricant du médicament, n’a pas fait le nécessaire dans les temps pour modifier la notice, manquant à son obligation de vigilance et d’information, a estimé le juge.

Risques solidement documentés

Après 1998, date à laquelle les exigences réglementaires qui pèsent sur les laboratoires ont changé, la faute de Sanofi est d’avoir laissé sur le marché un produit dit « défectueux », c’est-à-dire ne garantissant pas la sécurité attendue, alors même que les risques étaient solidement documentés. Il faut attendre 2006 pour voir apparaître sur la notice la mention « déconseillé tout au long de la grossesse ». Jusqu’alors, elle avertissait d’une éventuelle adaptation du traitement et d’une surveillance particulière, mais précisait : « Il est important de ne pas arrêter le traitement car il existe un risque de réapparition de crises pouvant avoir des conséquences pour vous ou votre enfant. » Sur le document qui leur était destiné, les médecins pouvaient lire : « Chez une femme épileptique traitée par le valproate, il ne semble pas légitime de déconseiller une conception. Si une grossesse est envisagée, c’est l’occasion de peser à nouveau l’indication du traitement antiépileptique. » Depuis 2018, le valproate de sodium est totalement contre-indiqué chez les femmes en âge d’avoir des enfants.

Procédure judiciaire inédite

Sanofi, rejetant sur les autorités sanitaires la responsabilité d’un changement tardif de notice, a fait appel. Mais si la recevabilité de l’action de groupe devait être confirmée, elle ouvrirait la voie à une procédure judiciaire inédite à laquelle pourraient s’associer toutes les femmes et les enfants exposés au médicament entre 1984 et 2006 pour les malformations, et entre 2001 et 2006 pour les troubles du développement.

L’Apesac, dont la présidente Marine Martin s’est dite satisfaite du jugement, n’exclut pas de faire appel également. L’association conteste le parti pris du tribunal de retenir l’année 2001 comme point de départ pour les enfants atteints d’autisme, quand le lien avec le valproate de sodium était connu bien avant cette date, et aurait dû faire l’objet d’une alerte de la part du laboratoire. Ces questions cruciales qui opposent le laboratoire à l’Apesac n’ont pas fini d’occuper la justice : Sanofi est également poursuivi au pénal pour homicide et blessures involontaires depuis 2020. Un procès similaire à celui du Mediator est attendu. L’instruction est en cours.

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